« Souveraineté numérique : les opérateurs publics de l’achat, tiers de confiance au service de l’indépendance des hôpitaux »

L’adoption massive de technologies numériques et de l’informatique en nuage (cloud computing) est porteuse de transformations profondes pour les infrastructures des établissements de santé. Ces avancées promettent une révolution technologique, mais posent aussi des questions sur l’utilisation des données de santé, la cybersécurité, la dépendance économique, ou encore la pérennité des investissements.

Dans cette transition, les groupements d’achats hospitaliers doivent jouer un rôle clé pour accompagner les hôpitaux tout en protégeant leurs intérêts. Ce rôle dépasse la simple mutualisation des besoins et des achats : ils doivent agir comme un tiers de confiance, garantissant que les choix technologiques ne compromettent ni la sécurité des données, ni l’autonomie des établissements de santé.

Agir face aux nouvelles contraintes imposées par les technologies de rupture

Les systèmes d’information hospitaliers reposent encore largement sur des infrastructures fragmentées et des logiciels hétérogènes, compliquant leur migration vers des environnements en nuage (cloud). Ce basculement implique souvent un rapport déséquilibré avec les fournisseurs, qui imposent leurs modèles tarifaires et contractuels.

L’informatique en nuage (cloud), par exemple, transforme les dépenses en coûts récurrents, tandis que les budgets hospitaliers, eux, restent construits autour de la logique d’investissement. Les solutions souveraines dites de « confiance », pourtant nécessaires, sont souvent 20 % plus coûteuses que leurs alternatives. Ce désalignement expose les établissements de santé à des pressions économiques et décisionnelles difficiles à surmonter.

Préserver la souveraineté des établissements de santé

C’est ici que les groupements d’achat interviennent : en tant qu’acteurs reconnus et médiateurs entre les industriels et les établissements hospitaliers, ils veillent à ce que les règles du jeu ne soient pas imposées uniquement par les fournisseurs, en structurant des marchés publics qui protègent les intérêts collectifs de nos établissements de santé.

A titre d’exemple, l’élaboration d’un ensemble de clauses contractuelles de sécurité informatique qui a vocation à être utilisé dans tous les marchés publics hospitaliers, intègre désormais les normes en la matière et les exigences contractuelles liées au cloud. Ces outils offrent une base objective pour les choix technologiques des hôpitaux, tout en assurant un haut niveau de transparence et de protection des données sensibles.

Notre action a aussi démontré son efficacité face à des acteurs puissants. Qu’il s’agisse de limiter les surcoûts imposés par un opérateur mondial après le rachat d’une technologie

captive ou de négocier un marché public unique au monde et adapté à nos hôpitaux avec un industriel américain, nous avons su défendre les intérêts des établissements hospitaliers et plus globalement l’intérêt général pour notre système de santé.

Bâtir une stratégie nationale

Le passage aux technologies numériques nécessite donc une vision stratégique nationale, mobilisant les groupements d’achat, les pouvoirs publics et les hôpitaux eux-mêmes.

L’objectif ? Garantir une transition numérique maîtrisée et souveraine. Cela passe par des audits réguliers des impacts technologiques et financiers, par la structuration de contrats publics solides et par une coordination accrue entre tous les acteurs concernés.

Les groupements d’achat publics ne peuvent pas se contenter d’optimiser les coûts, et doivent s’affirmer comme des tiers de confiance, garants de la souveraineté des hôpitaux dans un environnement technologique toujours plus complexe.

Le défi dépasse de simples considérations budgétaires : il s’agit de faire en sorte que les nouvelles technologies soient mises au service des établissements de santé, et non l’inverse.


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